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Temptresses

“THE BAT MAHLAT'S NIGHT”. C’était donc cette grande enseigne clignotante en néon qui faisait tant parler d’elle ? On disait qu'en journée et les soirs de semaine, cet établissement, qui était à l’origine un vieille usine désaffectée, était un bar assez banal, mais plutôt cosy, en soi. La musique n’était pas trop forte, l'ambiance y était bonne : en plus d’y avoir un bon personnel on trouvait au premier niveau des tables de jeux de cartes, de billards, des fléchettes et d’autres choses de ce genre pour se divertir ; on y servait de la bonne bière et de bons cocktails et les gens qui y venaient en général étaient plutôt sympathiques. Le tout rendait l’endroit particulièrement accueillant et convivial. Et puis le week-end, tout devenait différent. C’était comme si les masques tombaient, disait-on. En ouvrant le dit “Niveau -1” le Bat Mahlat’s Night devenait la boîte de nuit la plus en vue de Los Angeles, tous les vrais fêtards s’y rendaient. On disait que son atmosphère différait de toutes les autres boîtes de nuit. On lui avait dit qu’il fallait y être, le voir. Mais aussi, on lui avait même dit qu’on y trouvait la meilleure coc', la meilleure MDA, les meilleures amphet’ et l’une des meilleures herbes de la ville. Mais ça n'était pas pour la drogue qu’Alondra s’était rendue au Bat Mahlat’s Night en ce sombre vendredi soir. Son amie d’enfance, Benita, lui avait parlé d’une femme, la propriétaire de la boîte, la grande patronne de tout ça, sa patronne. Benita l’avait décrite comme une femme merveilleuse, sa bienfaitrice. Elle avait dit que grâce à elle, elle était parvenue à changer de vie, à ne plus être stripteaseuse avec un “bonus” selon ses fins de mois, et qu’elle se faisait respecter, maintenant. Grâce à cette femme, elle avait également trouvé un nouveau cercle d’amies, de nouvelles sœurs avec qui elle se sentait plus que bien. Qu'en définitive, Benita avait enfin trouvé sa véritable place dans ce monde, simplement parce que cette fameuse femme avait vu en elle quelque chose de différent. Alors elle avait conseillé à sa meilleure amie de rejoindre le groupe. C’était après avoir longuement réfléchi qu’Alondra avait décidé de se rendre au fameux club. À vrai dire, elle ne savait pas vraiment à quoi s’attendre. Elle n’avait même pas fait de recherches sur internet pour voir à quoi tout ça pouvait ressembler.

Après avoir longuement observé l’enseigne, Alondra posa son regard sur la foule qui se trouvait  dans les alentours. Elle était particulièrement surprise de voir la grande file de personnes qui se hâtaient d’entrer dans le club. Alors que la musique Dance entraînante se faisait à peine entendre de l’extérieur, le regard de notre protagoniste se posa curieusement sur l'entrée du club, où deux physionomistes : deux femmes portant de gros masques de diable en latex. L’une tenait un long trident apparemment fait de plastique et de fourrure et l’autre tamponnait le dos de la main des personnes autorisées à entrer dans la boîte. Toutes les deux étaient vêtues de manière assez particulière : des tenues légères faites d’un mélange de cuire, de latex et de tissus déchirés. C'était… particulièrement particulier. Alors qu’Alondra s'apprêtait à envoyer un message à son amie Benita pour lui annoncer qu’elle avait finalement accepté de venir au Bat Mahlat’s Night, elle fut surprise par une main la saisissant par l'épaule. Stupéfaite, en se retournant, la jeune femme découvrit une personne vêtue de la même manière que les deux physionomistes, portant cette fois-ci, un masque vénitien représentant un crâne orné de motifs baroques couleur or et de fausses pierres précieuses. Un petit cri de surprise s’échappa de la bouche d’Alondra :

« — C’est moi, Benita,  s’exclama la femme masquée avant de retirer son masque et de laisser s'échapper un léger rire ! Je suis trop contente que tu sois venue ! Viens je vais te faire visiter un peu la boîte ! La Patronne a vraiment hâte te de voir, je lui ai TELLEMENT parlé de toi ! »

[...] Au fur et à mesure qu’elles descendaient ces escaliers, Alondra commençait à sentir son corps s’envahir d’une grosse chaleur. La musique se faisait bien plus fort, bien plus intense : c'était comme si les basses battaient au rythme de son cœur qui commençait à s’emballer petit à petit. Plus elle descendait, plus ses sensations se décuplaient. Alondra avait presque l’impression de se rendre en enfer. Arrivées devant une grande porte noire, la portoricaine s'arrêta sec. Elle ne voulait pas aller plus loin. C’était comme si quelque chose la retenait. Sans doutes à cause du fait qu’elle avait toujours eu cette peur de l’inconnu. Alors, la jeune femme saisit Benita par l’épaule afin de lui faire face, puis elle prit la parole :

«— Écoute, je ne suis pas sûre d’être à l’aise ici, lança Alondra.
— Arrête tes conneries ! Et en plus, ça sera bientôt à mon tour de performer et je le fait qu'une fois dans le mois, donc t’as intérêt d’être là pour me voir briller ce soir !
— Tu vas performer ?! Attends, mais tu m’as pas dit que t'étais plus stripteaseuse ? demanda-t-elle sur un ton légèrement dérouté.
— Je le suis plus, rétorqua Benita avant de soupirer lourdement. Maintenant, je fais ça par passion, ici. Tu sais que j’ai toujours adoré le Pole Dance au niveau artistique et que j’ai malheureusement fini par exprimer mon talent sur ce podium miteux parce que je n’avais pas d’autres choix, ajouta-t-elle. …Bon, je sais pas ce qui te fais si peur, mais ramènes-toi, t’as plus le choix de toutes façon ! »

C'était sans attendre une seconde de plus que Benita ouvrit la grande porte noire et l'entraîna dans l'immense espace boîte de nuit. À sa grande surprise, Alondra ne fut pas spécialement époustouflée, en voyant la salle. Elle était très grande et très haute puisqu’elle se trouvait sur la mezzanine qui faisait le tour de la salle. Mais l’ambiance n'était pas si différente des autres boîtes de nuit. C'était assez sombre, avec quelques lumières tamisées de différentes couleurs et de la Dance se faisait entendre. Les seules choses qui l’interpelèrent étaient les trois grandes cages installées sur les trois côtés de la mezzanine, l’immense barre de pole en acier au centre, allant du sol au très haut plafond et l'épaisse couche de fumée présente sur le sol. Pendant un instant, son regard s'arrêta sur l’ascenseur qui venait de s'ouvrir au pied de l’escalier. Soulagée, Alondra explosa d’un rire franc avant de s’adresser à son amie, tout en descendant les escaliers à ses côtés :

«— C’est ÇA ta boîte de nuit incroyable ?! Désolée mais à part le fait que ça soit une ancienne immense usine désaffectée, et que le personnel est… sans vouloir te vexer, particulièrement vêtu… je ne vois pas ce qu’il y a de si différent avec les autres boîtes de la ville ! ...Et y a un ascenseur ! On n’aurait pas pu simplement le prendre au lieu de descendre toutes ces marche ?!»

En entendant les paroles de son amie, Benita ricana à son tour, particulièrement amusée par ces propos. Une fois arrivée en bas de l'escalier, après avoir ouvert la petite porte de la clôture en métal et être passées de l’autre côté, cette dernière passa devant Alondra avant de se retourner vers elle afin de lui répondre :

«— Ah ! s'exclama-t-elle avant de laisser s'échapper un léger rire. En prenant l’escalier c’était beaucoup plus théâtrale ! Et estimes-toi heureuse, seul le personnel a le droit de passer par là !»

En entendant les mots de son amie, elle poussa un rire sincère, tout en secouant négativement la tête.

«— Et où est-ce qu'elle est, ta fameuse Patronne ? relança Alondra
— Patience… La soirée n’a pas encore commencée, Alondra. J’espère que t’es prête ! lança Benita tout en attachant habilement son masque, avant de le secouer afin de s’assurer qu’il était bien fixé.»

C'était sans ajouter un mot de plus que Benita se fraya précipitamment un chemin dans la foule vers le centre de la salle. Alondra tenta de la suivre sur la piste de danse, mais elle se fit semer très rapidement. Puis tout s’arrêta. Plus de musique, plus de lumière… Le noir et le calme complet. Alors qu’une minorité se plaignait et tentait de s'éclairer à l’aide de leurs smartphones, une majorité restait calme et attendait avec impatience la suite des événements. Soudainement, des ricanements de femmes se firent entendre de partout dans la boîte, des bruits sourds de portes claquantes en métal se firent entendre trois fois de suite, le frottement lourd d’un métal contre le sol, des pas lourds, des chocs... Tout semblait s’agiter, l'atmosphère se réchauffait, la pression augmentait, Alondra regardait autour d’elle, mais elle ne distinguait absolument rien. Seulement des ombres créées grâce aux faibles lumières des téléphones. Tout à coup, plus rien. Plus aucun bruit, plus aucun mouvement. Subitement, un rire de femme bien plus léger, plus doux, plus sensuel, mais légèrement étouffé se fit nettement entendre. Instantanément, la femme au rire qui se trouvait mêlée à la foule se fit éclairer par la grosse lumière blanche d’un projecteur. C'était une blonde aux cheveux courts, tatouée, portant un masque vénitien doré, prenant la pose, main sur la hanche, tout en regardant autour d’elle. Alors que la foule acclamait cette femme tatouée tout en restant respectueusement éloignée d’elle créant ainsi un cercle autour celle-ci sur la grande piste de danse, Alondra l’observa attentivement d'où elle était. Elle portait un fin soutien-gorge triangle couleur chaire orné de fausses pierres précieuses, surmonté d’un épais harnais en cuir —sur lequel était accroché un microphone-chemise— rendant sa taille bien plus fine qu’elle ne l'était, accompagné de pontacourt skinny en jeans littéralement déchiqueté sur toute la partie avant de ses cuisses et portait aux pieds une paire de cuissardes à talons hauts en latex. Elle avait également enroulé autour de sa main gauche, une longue chaîne en acier qu’elle laissait traîner sur le sol. Après quelques secondes, cette dernière laissa s'écraser lourdement la chaîne qu’elle tenait contre le sol, puis elle retira enfin son masque, dévoilant son visage, ce qui fit instantanément réagir la foule. Apparemment, cette blonde est la grande star des lieux, pensa ironiquement Alondra. Enfin, la tatouée prit la parole :

«— Savez-vous ce qu’il se passe toutes les veilles de Mercredis et de Samedis ? … Non ? Et bien je vais vous le dire, lança-t-elle avant de légèrement de racler la gorge. Agrat Bat Mahlat, qui est une reine des démon hante l’air avec son cortège de dix-huit subordonnés. Devenant le démon du toit dansant, elle danse sur les toits… elle se trémousse, dit-elle en faisant glisser doucement sa main de la naissance de sa poitrine jusqu'à son bas-ventre tout en prenant la pose avant de laisser s'échapper un doux rire. ...pendant que sa pauvre grand-mère désespérée hurle le nom de Lilith.»

Soudain, un hurlement de désespoir se fit entendre du centre de la salle. La lumière qui éclairait la blonde s'éteignit, tandis qu’une lumière violette tamisée vint éclairer Benita, qui se retrouvait hissée presque au sommet de la grande barre de pole dance solide en acier. “LILITH !”, hurlait-elle sans relâche, d’une voix forte tout en glissant simplement et doucement en tournoyant sur la barre. Tout à coup, en employant des gestes secs et maîtrisés, la performeuse se retrouva la tête renversée et une douce et envolée mélodie Dance se fit instantanément entendre. Mais, Alondra décrocha rapidement son  regard de sa meilleure amie, alors que la foule semblait être obnubilée et époustouflée par les figures qu’elle proposait. En fait, Alondra essayait de retrouver du regard cette blonde pendant un long moment dans la pénombre. C’était étrange mais lorsqu’elle parlait, la portoricaine avait l’impression qu’elle la fixait intensément. Comme si elle était devenue transparente à ses yeux et que cette femme avait pu voir qui elle était vraiment. Elle ne s'était jamais sentie aussi mal à l'aise devant une femme de sa vie. N’ayant pas réussie à la retrouver, Alondra reposa alors son regard sur Benita, qui était presque à la fin de son show. Pendant un instant, elle s'en était voulue de ne pas avoir regardé toute la prestation de son amie d’enfance. Cette dernière glissait assez rapidement vers le bas de la barre, tête renversée tout en poussant un hurlement qui pouvait s’apparenter à de la peur, comme si elle allait s'écraser. Presque arrivée au niveau du sol, le projecteur qui éclairait la pole-danceuse s'éteignit sèchement, de la même manière qu’elle s’arrêta d’hurler et que la musique s'arrêta. Si Alondra ne savait pas de quoi son amie était capable de faire sur une barre, elle se serait laissée penser qu'elle s'était vulgairement écrasée contre le sol, comme une partie des personnes naïves présentes. Enfin, pour mettre une touche finale à cette  sorte d’introduction à la soirée, étrangement proche d’elle, elle dirait même en face d'elle, Alondra entendit la voix de la blonde prononcer ces derniers mots :

«— Dansez, consommez, séduisez… abandonnez-vous. Laissez-vous guider par vos démons, et laissez vous entraîner par les tentatrices présentes ici qui vous trouveront et vous donneront tout ce dont vous avez besoin et vous fait envie... J’espère que vous avez apprécié être ici jusqu’à maintenant. Car la soirée vient tout juste de commencer.»

Lorsque la blonde eut fini de parler, un nouveau hurlement strident presque hystérique se fit entendre dans la direction de Benita accompagnés de ricanements et en un instant de grands projecteurs projetant des lumières tamisées rouges, oranges et jaune, s'allumèrent. Les éclairages donnèrent l’impression que la fumée s'était transformée en flammes dansantes et virevoltantes entre et autour des fêtards. De la musique Trap se fit brutalement entendre sous les applaudissements et les acclamations de la foule. Au niveau de la mezzanine, dans chacune des trois grandes cages, on trouvait un duo de femmes se trémoussant toujours vêtues dans le même esprit cuire/latex/tissus et masquées ; vers le grand bar, les deux barmaids portant des cagoules à Zip en élasthanne fluorescentes servaient activement les clients pendant deux danseuses se déhanchaient sur les rythmes endiablés que proposait la D-J sur le grand comptoir en métal. Les gens dansaient, buvaient, se rapprochaient, et si l’on faisait bien attention, on pouvait remarquer de nombreux échanges discrets entre les clients et certaines employées. L’ambiance était devenue totalement différente. Beaucoup  moins classique, beaucoup moins sage : le Bat Mahlat's Night puait le vice. C’était presque comme si on avait changé d’endroit. Mais en cet instant, rien de tout ce spectacle ne semblait réellement intéresser Alondra, car son regard s'était retrouvé figé dans les iris hypnotique de celle qui semblait être la maîtresse des lieux, qui n’était qu'à moins d’un mètre d’elle. Incapable de lancer la conversation, la jeune femme l’observa, en attendant que quelque chose se passe. Ce fut après quelques secondes de dévisagement mutuel que la fameuse blonde prit la parole :

«— Tu dois être Alondra, c’est ça ? Benita m’a énormément parlé de toi. Moi c'est Chrystal, la propriétaire des lieux, enchantée, lança la blonde avant de faire un pause. Je suis très, très contente que tu sois venue ce soir… Viens, nous avons énormément de choses à nous dire et j'ai pas mal de choses à te faire voir, trésor…»

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